SOUFFRANCES AU TRAVAIL |
La Lettre de SAT N°1 Octobre 2006 |
Souffrances au travail… Quel traitement par la psychanalyse ? était le thème retenu par l’association Souffrances Au Travail (SAT), pour son premier colloque organisé le 17 juin 2006 à la Bourse du travail- Paris, présidé par Francesca Biagi-Chai, psychiatre, psychanalyste, membre de l’ECF*.
L’Association Souffrances au Travail, dont les membres, psychanalystes, sont orientés par les enseignements de Jacques Lacan et Jacques-Alain Miller, a souhaité, 5 ans après sa création, témoigner du travail qui s’opère auprès des personnes qu’elle reçoit. Cet après-midi de travail qui a réuni plus de 60 personnes psychologues, psychanalystes, médecins, médecins du travail, membres de CHSCT, coaches, a été l’occasion de débattre des souffrances au travail du sujet contemporain et de présenter les spécificités de la pratique de psychanalyse appliquée au sein de SAT. Les souffrances au travail, un phénomène récent dont l’ampleur est en constante progression. Dominique Maillot, contrôleur du travail et délégué FO, et René Valentin, Secrétaire syndical FO de l’AP-HP, ouvraient ce colloque avec deux exposés pleins d’émotions et de conviction, évoquant les souffrances au travail tant sous l’angle politique, économique et juridique que sous l’angle social. Il semble révolu le temps où l’organisation du travail s’inscrivait dans un mode collectif, où la solidarité permettait à chacun de s’alléger de situations professionnelles pesantes. Aujourd’hui, c’est sur le versant de l’individualisme et de la solitude que se construit le nouveau capitalisme. Selon D. Maillot, la souffrance au travail est un phénomène plutôt récent, lié à la montée du chômage et à la précarisation de contrats de travail (CDD, CNE, CPE…), le chantage à la délocalisation et à la sous-traitance massive venant encore renforcer le sentiment d’insécurité. De plus, de nouvelles pratiques managériales requièrent de la part des salariés une adhésion dépassant le seul cadre du droit du travail et exercent sur eux une pression toujours plus forte, pouvant amener certains sujets au point de rupture. L’entreprise moderne abolit la citoyenneté de l’individu, lequel n’a plus possibilité de refuser ce qu’elle lui demande, lorsque cela va contre l’éthique citoyenne. Le savoir opposé à une jouissance. Francesca Biagi-Chai en ponctuation de ces premières interventions, mettait en évidence le point de rencontre entre syndicalistes et psychanalystes. Tous deux rendent compte d’un même point : celui du silence du sujet pétrifié et dépossédé de sa parole dans son environnement professionnel. Et c’est bien ce dont il s’agit dans les entretiens menés au sein de SAT : désintriquer la jouissance féroce exigée d’un système capitaliste mené par la dictature de la marge pour permettre au sujet de reprendre le chemin d’une parole.
Traiter une impasse par la psychanalyse René Fiori, Président de l’association, a ensuite présenté les principes fondateurs de SAT et les orientations cliniques retenues. Du travail qui se fait à chaque rencontre avec un sujet, René Fiori indiquait qu’il s’agit du traitement d’une impasse par le moyen de la psychanalyse, avec, au bout du compte l’ouverture possible sur un allègement pour la personne, produit d’une solution particulière issue d’éléments subjectifs singuliers, auxquels il est essentiel de ménager un accès, afin que le sujet puisse en avoir une entre vision. La direction qui s’est avérée la bonne fut de se conformer à la lettre de ce qui nous était rapporté, pour y déceler et tenter d’animer les points où le sujet était englué et qui s’avéraient mortifères pour lui. René Fiori pointait également l’importance de prendre le sujet par le biais de sa fonction d’acteur et non par celui où il se manifeste comme victime d’une situation qui, dans la plupart des cas, est néanmoins bien objectivée et réelle. Cette fonction d’acteur étant aussi bien celle de prendre acte de ce qui surgit dans les entretiens.
L’extimité, pierre de touche des entretiens psychanalytiques Il s’agit, dans les entretiens proposés à SAT de permettre au sujet un mouvement, à savoir, qu’il puisse se dégager d’une position qui lui est assignée dans son environnement professionnel. Quelque chose d’intime et qui reste insu pour cette personne, est atteint, touché malgré elle. Il s’agit là de l’incidence particulière d’une structure, communication d’une zone intime, le plus intérieur en nous et d’une extériorité, cette extimité est au cœur de l’expérience psychanalytique. La mise en circuit de ces deux versants, intime et externe est dans tous les cas désorientation pour le sujet. Le psychanalyste doit se mettre en position d’agent de ce travail, la personne y gagne à être l’acteur ; activée ainsi localement dans ce dispositif dans le champ du langage, cette fonction d’acteur retrouvée libère un champ plus large à partir de ce qui a été touché, localisé, dans les entretiens. C’est là la dynamique propre au champ analytique. |
Souffrances au travail… Quel traitement par la psychanalyse ?
Colloque organisé par l’association Souffrances Au Travail le 17 Juin 2006
Compte-rendu - première partie |